Atelier autour du projet RePPOL, Rethinking the Prebendaries Plot On Line, Mardi 29 juin 2021, 14h-17h30, Salle André Bollier (MSH Lyon-Saint Etienne, Centre Berthelot) et en distanciel
Atelier autour du projet RePPOL
Rethinking the Prebendaries Plot On Line
Organisateurs
Aude de Mézerac-Zanetti aude.de-mezerac[at]univ-lille.fr
Olivier Spina olivier.spina[at]univ-lyon2.fr
Mardi 29 juin 2021, 14h-17h30
Salle André Bollier (MSH Lyon-Saint Etienne, Centre Berthelot)
et en distanciel
RePPOL est un projet scientifique et pédagogique collaboratif mené par Aude de Mézerac-Zanetti (Université de Lille, CECILLE), Olivier Spina (Université de Lyon 2, LARHRA) et Victoria Le Fourner (ingénieure d’études, spécialiste des humanités numériques à la MESHS de Lille) avec l’aide de Felipe Goes-Silva (étudiant en M1 Recherche en Études Anglophones à l’Université de Lille).
Notre projet est consacré à la transcription, l’édition critique et l’analyse d’un document exceptionnel : le manuscrit MS 128 conservé à la bibliothèque de Corpus Christi College, Cambridge (à voir sur la plateforme TACT, https://tact.demarre-shs.fr/project/31). Il s’agit d’un manuscrit composite d’environ 220 folios qui contient la documentation rassemblée en 1543 sous l’égide de l’Archevêque de Cantorbéry, Thomas Cranmer. Celui-ci, gagné aux idées réformées, est visé par un complot ourdi par des chanoines de sa propre cathédrale (d’où le surnom de Prebendaries Plot) en lien avec des prêtres et des laïcs « conservateurs » du diocèse du Kent. Ces derniers initient un travail de collecte de dénonciations attestant de la radicalité religieuse de Cranmer et de certains de ses clients réformés afin de discréditer l’archevêque de Cantorbéry aux yeux du roi et précipiter sa chute. Cependant, le roi maintient sa faveur à Cranmer mais le charge d’enquêter sur toutes les croyances ou pratiques non conformistes dans son diocèse. L’objectif de cette vaste enquête est encore à élucider. L’archevêque semble saisir cette occasion pour incriminer les clercs et les laïcs conservateurs qui ont participé au Prebendaries Plot : ses agents collectent dénonciations et témoignages de croyances ou pratiques « superstitieuses » ou « papistes » ; mais, le manuscrit renferme également des dénonciations de sacramentaires, d’iconoclastes et d’évangéliques radicaux, qui auraient davantage pu susciter l’indulgence de Cranmer.
Dès lors, le manuscrit MS 128, fruits de ces collectes antinomiques, est une mosaïque double. Mosaïque de documents d’abord, puisqu’il comporte des lettres de dénonciations, des interrogatoires ou encore des mémorandums dont le sens nous échappe en partie ; mais il est aussi une mosaïque de traces des croyances et des pratiques religieuses dans un comté anglais des années 1540. En effet, il renferme plus d’une centaine de témoignages ou dénonciations émanant de clercs et de laïcs des deux sexes et de tout rang. Cette documentation fragmentée révèle l’éclectisme des croyances et des pratiques dans cette Angleterre qui a rompu avec Rome depuis près de dix ans et dans laquelle Henri VIII peine à imposer une quelconque uniformité malgré l’instauration de la Suprématie royale. Ce manuscrit serait-il la trace archivistique des tentatives royales (et de leurs limites) d’imposer une « uniformité religieuse » désirée par Henri VIII depuis le début des années 1530 ?
Jusqu’à présent, plusieurs historiens ont mobilisé partiellement cette source dans le contexte d’études plus larges (Ethan Shagan afin d’explorer l’avancée de la Réforme en Angleterre, Diarmaid MacCulloch pour dresser les portraits des détracteurs de Thomas Cranmer dans la biographie qu’il lui consacre…), mais aucune étude du manuscrit per se n’a été menée et on ne l’a jamais fait dialoguer avec des documents proches (interrogatoires, dénonciations…) pour en dégager les éclairages politiques, religieux ou sociaux qu’il peut apporter sur la période.
Or, le projet RePPOL entend montrer que cette source exceptionnelle permet non seulement d’éclairer les croyances et les pratiques liturgiques populaires souvent inattendues, parfois cocasses, dans un Kent en « transition confessionnelle », mais aussi de saisir la Réforme anglaise comme un phénomène de transformation anthropologique du rapport au religieux, processus qui s’étend sur des plusieurs décennies du XVIe siècle. RePPOL s’inscrit enfin dans le cadre des renouvellements historiographiques récents sur le rôle du peuple dans la production du politique à l’époque moderne, ces témoignages permettant de comprendre le rôle actif que les sujets, y compris les laïcs les plus infimes, ont pu jouer dans les processus de mutations politico-religieuses que connaît l’Angleterre henricienne.
Cette demi-journée a deux ambitions. La première est d’être un atelier de travail au cours duquel seront présentées la dimension scientifique du projet RePPOL mais aussi les possibilités pédagogiques que ce manuscrit offre comme support de cours de paléographie ou comme objet d’étude pour des étudiants en master. La seconde est d’être une table ronde au cours de laquelle toutes les remarques sur les dimensions numériques, pédagogiques et scientifiques du projet contribueront à faire avancer et affiner le projet. Il s’agira entre autres de mettre en perspective le manuscrit dans une histoire européenne des Réformes ou encore d’évoquer l’apport des Humanités numériques dans la réflexion scientifique.
Programme de l’atelier :
Table ronde 1 : « Un document, mille facettes » : enquête historique sur la pluralité confessionnelle dans une société de l’époque moderne (14h à 15h45)
- Un manuscrit original et complexe : présentation matérielle et du contenu du manuscrit MS 128 (Olivier Spina et Aude de Mézerac-Zanetti)
- Un contexte troublé : la réformation henricienne, aspects religieux et politiques (Olivier Spina et Aude de Mézerac-Zanetti)
- Discussion autour des enjeux scientifiques et de l’intérêt de cette source en histoire politique, sociale et religieuse dans un premier XVIe siècle secoué par les Réformes.
Table ronde 2 : « Humanités numériques », « formation par la recherche », « diffusion du savoir » : une autre façon de pratiquer et d’enseigner l’histoire ? (16h-17h30)
- Présentation du work-flow, de la plateforme collaborative de transcription et de la dimension humanités numériques du projet (Victoria Le Fourner)
- Une ambition pédagogique double : initiation à la paléographie anglaise par la transcription encadrée et support de travaux de mémoire de Master Recherche civilisation britannique et histoire moderne (Aude de Mézerac-Zanetti, Oliver Spina, Felipe Goes-Silva)
- Discussion autour des possibilités pédagogiques offertes par le MS 128 dans le cadre du projet RePPOL : enseigner l’histoire ou faire faire de l’histoire ?
Le projet est soutenu par la MESHS, l’UMR-5190 LARHRA et le laboratoire CECILLE.
Le projet est financé par l’I-SITE Université Lille Nord-Europe.
Olivier Spina
Mcf Histoire moderne
Université Lumière Lyon 2
Responsable du Master MEEF Histoire-Géographie
Responsable de la préparation à l’agrégation d’histoire
LARHRA