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AHMUF _ Association des Historiens Modernistes des Universités de France

Les Chroniqueurs d’Aragon et les pouvoirs de l’écrit. Les tisseurs du temps.

par · Publié · Mis à jour

Héloïse Hermant, Les Chroniqueurs d’Aragon et les pouvoirs de l’écrit. Les tisseurs du temps, Paris, Classiques Garnier, 2023, 804 p.

EAN : 9782406148777; DOI : 10.48611/ISBN. 48,00 €

À partir d’un point de vue décentré, celui du royaume d’Aragon, ce travail analyse les processus d’écriture de l’histoire officielle à travers le groupe des chroniqueurs officiels d’Aragon et plus largement des autres chroniqueurs officiels de la monarchie. Cette écriture collective est issue de collaborations codifiées propres au monde savant, d’intenses négociations nouées entre roi, royaume, localités et particuliers, mais également nouées par le rapport parfois houleux aux commanditaires, par la traversée toujours délicate des dispositifs de censure (religieuse, régnicole et royale) et par les difficultés que rencontrent nos chroniqueurs pour consulter certaines archives réservées. En partant de la matérialité des écrits et de l’imbrication des réseaux savants et politiques et en restituant les opérations pragmatiques qui vont de la délimitation du dicible et du mémorable à leur transformation en livre, c’est toute une histoire de la formation, de la circulation et de la manutention de l’information historiographique qui se dessine. L’histoire peut être considérée à la fois comme une écriture de service et comme un ensemble de pratiques et de gestes intellectuels dont la validation comme savoir et l’horizon de recevabilité se forgent dans des interactions corsetées par des codes sociaux et des impératifs politiques. Mais il s’agit aussi de montrer comment l’élaboration (collaborative ou conflictuelle) de ces récits d’un passé commun contribue dans son mouvement même, à articuler territoires et communautés à l’échelle de la monarchie à partir de leurs particularismes. Sans nous laisser enfermer dans le face à face roi/royaume, nous cherchons à établir une histoire de la monarchie composite espagnole pensée comme corps communicationnel, tant il est vrai que les discours sur le passé résultent de négociations entre des forces sociales et des institutions qui impliquent toute la péninsule.

 

Mots clés : Annales de la Couronne d’Aragon, Aragon, archives, censure, chorographie, chroniqueurs, conflits, correspondances, culture écrite, Députation d’Aragon, érudition, Espagne, faux, généalogie, historiographie, livre, mémoire, monarchie composite, mondes savants, passé, pouvoirs, polygraphes, travail, révolte, réseaux, roi, sociabilité.

Table des matières :

Abréviations , p.  9

INTRODUCTION

  1. La peste, le vampire et le parchemin : la soif des archives p. 11
  2. Délimiter et négocier le mémorable, tisser le temps, structurer les collectifs p. 14
  3. Les chroniqueurs d’Aragon, une histoire encore à écrire p. 17
  4. Un prisme opératoire, un objet carrefour : les chroniqueurs d’Aragon et la nébuleuse des historiographes officiels de la monarchie hispanique p. 24
  5. Les fils de l’histoire. Déplacements, croisements et reformulations p. 29
  6. Matériaux : les fils du temps p. 36
  7. La trame de l’enquête : les tisseurs du temps et leur métier p. 41

PREMIÈRE PARTIE. LIEUX DE POUVOIR, LIEUX DE SAVOIR. LE CHRONIQUEUR, LE ROYAUME ET LE ROI

Chapitre premier. L’Office de chroniqueur d’Aragon : déploiement institutionnel et évolutions p. 49

  1. Le chroniqueur du royaume d’Aragon p. 30

1.1. Création, fonction, nomination (51) — 1.2. Le chroniqueur et ses doubles : commissionnés, extraordinaires et honoraires (55)

  1. Pouvoir de l’office : attraction, accords et désaccords p. 38

2.1. Cooptation, débats et patronage (63) — 2.2. Un office convoité : campagnes, rivalités et affrontements (67)

  1. Le chroniqueur de la Couronne d’Aragon : une place stratégique p. 49

3.1. Dans l’orbite royale : phagocytage ou conciliation ? (79) — 3.2. Police du livre et collaboration transterritoriale (91) — 3.3. Le magistère Pellicer : servir le roi et se servir  (98) — 3.4. Diego José Dormer contre Lucio Espinosa : tremplin ou sinécure ? (106)

  1. Espace politique et espace savant : la monarchie et le grand marché
    des chroniqueurs p. 115

4.1. Régnicoles (115) — 4.2. Courtisans ? Tropisme madrilène et jeux de masques (125)

  1. République des chroniqueurs ou « dispositif » historiographique ? p. 133

ÉPILOGUE. Foyers d’écriture, contournements et ajustements p. 140

 Chapitre 2. Les chroniqueurs d’Aragon entre roi et royaume : configurer les liens p. 147

  1. Dans l’ombilic du pouvoir : des « ministres publics » attachés à la Députation p. 149

1.1. Petites mains et grandes plumes : archiver et (in)former les institutions (149) — 1.2. Expertiser (163) — 1.3. Collecter, sanctuariser, publier. La Députation en lieu de pouvoir (167)

  1. Une politique par le livre ? Commandes et conjonctures p. 179

2.1. Promouvoir l’identité aragonaise : fama et jeux d’échelles (179) — 2.2. Autour de Sobrarbe. L’histoire au secours du droit, entre fiction juridique, mythe historiographique et tensions politiques (189) — 2.3. Au cœur de la révolte de 1591-1592 : archives et papiers du désordre (206) — 2.4. Solder la révolte ? La défense des institutions et de la fidélité du royaume (212) — 2.5. L’Aragon, cœur de la monarchie ? Une guerre des places sur fond d’histoire commune (226)

  1. L’articulation des fidélités : le particularisme comme facteur d’intégration p. 242

3.1. Miroirs : épîtres dédicatoires et politique de présentation de soi (242) — 3.2. Appartenances : patronages, tensions et équilibrages (251)

ÉPILOGUE. Décrets de Nueva Planta et mort de l’institution p. 257

 

DEUXIÈME PARTIE. CHRONIQUEURS : FIGURES, TRAJECTOIRES, CONSTRUCTION SOCIALE

Chapitre 3. Écrire dans la dépendance : tutelle, surveillance et capacité d’action p. 265

  1. Surveillance, critique et censure : la fidélité à l’épreuve p. 268

1.1. Clio face à elle-même : rhétorique, dispositif publicitaire ou discours normatif ? (268) — 1.2. Nécessité de la censure et négociation des rôles (273) — 1.3. Cooptation et distinction : censure, fidélité et expertise (288)

  1. Service ou servitude ? Des forçats de plume p. 296

2.1. Pressions et surveillance : l’incorporation de la discipline (296) — 2.2. Dépossessions : auteurs ou exécutants ? (310) — 2.3. L’heure des comptes (319)

  1. Prudence et service politique à l’épreuve des crises : le laboratoire de 1591 p. 331

3.1. Concilier l’inconciliable : du silence au silence ? (331) — 3.2. La prudence à l’œuvre (341) — 3.3 Des professionnels de la publication : rivalités, stratagèmes et déontologie au prisme de la censure (348)

ÉPILOGUE. Sous la bannière de Tacite ?  p. 356

Chapitre 4. Trajectoires : le chroniqueur en polygraphe p. 361

  1. Devenir chroniqueur : l’espace des possibles p. 364

1.1. Le cas inaugural de Zurita ou l’ouverture des possibles : un agent de l’Inquisition en chroniqueur (364) — 1.2. Une consécration pour le vivier intellectuel local ? Réseaux, réputation et publication au service de la distinction autour de Blancas, Costa et Martel (368) — 1.3. Sinuosités et contingence : les différentes significations et implications de l’office à différents moments du parcours sociopolitique des Leonardo (378) — 1.4. Andrés et Dormer, chroniqueurs avant la lettre : mécanismes probatoires et performativité ou comment lisser une trajectoire (384)

  1. Investir l’office : un tableau contrasté p. 395

2.1. Le chroniqueur et ses identités socioprofessionnelles : articuler et négocier la polyactivité, redéfinir une identité (Zurita, les Leonardo, Andrés) (395) — 2.2. Ximénez de Urrea : « occuper » et utiliser l’office (405) — 2.3. Goût et dégoût de l’histoire de Dormer : nouer et dénouer les carrières (413) — 2.4. Être ou ne pas être chroniqueur : Sayas et Porter (422)

  1. Compétences, polyvalence et reconversions p. 430

3.1. Des acteurs multiformes du monde du livre (431) — 3.2. Notaires, secrétaires et généalogistes : les savoir-faire en résonnance du chroniqueur (443) — 3.3. Lignes de fuite ? La construction d’une figure d’expert (456)

ÉPILOGUE. À l’ombre de Zurita : (Auto)portraits de chroniqueurs et construction négociée d’une figure sociale  p. 463

TROISIÈME PARTIE. LA FABRIQUE COLLECTIVE DE L’HISTOIRE DANS UNE MONARCHIE COMPOSITE : SOCIABILITÉ, NÉGOCIATIONS, POLYPHONIE

Chapitre 5. La fabrique collective de l’histoire p. 475

  1. L’empreinte du faux : pluralité des mécanismes d’accréditation et de validation des savoirs p. 482

1.1. Savoirs et sociabilité : l’affaire Luis López (482) — 1.2. Faussaires, critiques, apocryphes : rhétorique de l’archive, logiques d’intéressement et homogénéisation des savoirs (496)

  1. Communautés savantes : ancrages, réseaux et circulations p. 514

2.1. Tisser et entretenir les liens : antidora, épistolarité, circulations (514) — 2.2. Structuration, dynamiques et spatialité des réseaux des chroniqueurs (521)

  1. Polyphonies : archives, accessibilité, conditionnement p. 543

3.1. Canaux officiels et canaux informels (543) — 3.2. Lieux de pouvoir, temples de mémoire et d’oubli : épreuves, procédures et positionnement (546) — 3.3. Autour de quelques convulsions politiques : tisser le consensus ? (559)

ÉPILOGUE. Prévenir la cacophonie, anticiper le déshonneur ? Jeu des temps autour d’une guerre civile catalane p. 575

Chapitre 6 : Radiographie d’une monarchie composée : Articulation des territoires et usages sociopolitiques de la mémoire p. 583

  1. Entre who’s who et incubateur de mémoires : histoire officielle et corps social p. 589

1.1. Les Annales de la Couronne d’Aragon : mécanismes de diffusion entre vente et distribution (589) — 1.2. Marqueur de distinction et force probatoire : le pouvoir social des Annales (594) — 1.3. Dialogue et coproduction : (faire) moduler le récit matriciel ? (605)

  1. Articulation des territoires et des identités. Contributions aragonaises aux histoires générales d’Espagne p. 611
  2. Les passés régnicoles comme « Materia de España ». Pour une histoire transversale de la monarchie composée p. 616

3.1. Aragon, Navarre, Cantabrie, France. Dynamiques d’intégration sur fond de polémique (616) — 3.2. Aragon, Catalogne, France, Espagne. Circulations, histoires croisées, histoires partagées (655)

ÉPILOGUE. Les « quatre barres de sang », la croix de Sobrarbe et la croix de saint Georges  p. 678

 

CONCLUSION

  1. Des hommes et des lieux. Les Indes de l’Antiquité p. 687
  2. Clio ou Pénélope ? p. 694
  3. Livres et écritures. Tisser le commun à travers le particulier p. 700

ANNEXES

  1. Chronologie des chroniqueurs officiels du royaume d’Aragon et de la Couronne d’Aragon et des chroniqueurs officiels de la monarchie p. 709
  2. Chronologie des écrits patronnées et financés par la Députation p. 711
  3. Éditions et rééditions des Annales de la Couronne d’Aragon p. 721

 

Catalogues, outils de travail, recueils de source p. 723

Sources imprimées et sources éditées p. 727

Sources manuscrites p. 741

Bibliographie  p. 751

Index  p. 785

Table des illustrations  p. 795

OpenEdition vous propose de citer ce billet de la manière suivante :
AHMUF (6 septembre 2023). Les Chroniqueurs d’Aragon et les pouvoirs de l’écrit. Les tisseurs du temps. AHMUF _ Association des Historiens Modernistes des Universités de France. Consulté le 13 octobre 2024 à l’adresse https://doi.org/10.58079/awb1

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